La Nivenna est voisine de l'Akhache sévère et renfrogné – la couche d'élémentaux arctiques et antarctiques associés aux régions polaires de notre planète. L’Akhache possède l’étendue cosmique : la Voie lactée en est visible. Aux saisons correspondantes, les frontières des deux zones polaires se rapprochent des tropiques. L'âme effrénée de ces créatures, avec sa tendance à passer de la contemplation limpide à la fureur, avec ses impulsions à construire des mondes entiers à partir des glaces transphysiques, avec son amour de regarder, les yeux dans les yeux, dans les fosses sans fond de la métagalaxie, a laissé une empreinte frappante sur la nature des bassins polaires visible par nous tous. Lorsque la rotation de la Terre autour du Soleil provoque l'arrivée de l'hiver dans l'hémisphère nord et rend les zones habitées des continents accessibles aux élémentaux de l'Akhache, ceux-ci l'envahissent, entraînant avec eux des masses physiques de l'air arctique, ils provoquent des blizzards et des tempêtes de neige à travers les champs et la taïga, puis ils se réjouissent dans les hauteurs avec des anticyclones. Ils ne peuvent pas voir Enrof comme nous. Leur vue ne permet pas de percevoir les humains non plus. Mais il y en a parmi eux les prédateurs et les esprits mentalement froids, comme la Reine des neiges d'Andersen – ils sont dangereux pour l'homme. Mais il y en a d'autres qui captent les fibres de l'âme de ceux d'entre nous qui leur ressemblent en courage, prouesse et intrépidité. Ils peuvent aimer ces individus d'un amour étrange et disproportionné. Ils les bercent sur leurs genoux neigeux, leur ouvrent la voie vers les profondeurs de leurs pays, leur montrent la terrible splendeur de leur royaume et, sans évaluer leur grandeur et notre petitesse corporelle, sont prêts à les envelopper dans un linceul blanc aux chants des blizzards. Et, tout comme le monde de l'Akhache a une extension cosmique, il en va de même pour les deux dernières couches d’élémentaux : le Diramnus, qui se situe au niveau des airs stratosphériques des basses températures, et la Sianna, le monde visible (à la vue spirituelle) à travers les zones des hautes températures qui entourent notre planète à haute altitude. Cependant, les élémentaux qui y vivent sont si énormes et si étrangers à notre perception qu'il est extrêmement difficile de comprendre leur essence. Ils sont lumineux, mais leur lumière est brûlante est impitoyable. Seul l'esprit humain qui a déjà atteint une hauteur exceptionnelle peut accéder à leur royaume. Telle est la sakouale des Elémentaux Mineurs. Mineurs non vis-à-vis des humains – la plupart d'entre eux est beaucoup plus puissant qu'un simple humain – mais par rapport à une autre sakouale, celle des Élémentaux Suprêmes à l’échelle ascendante, qui est une rangée de véritables divinités planétaires. Eux, ce sont des maîtres. Rien que leur souffle fait les élémentaux inférieurs frémir de joie. La plupart d'entre eux sont de beaux êtres hautement vertueux d'une grandeur inexprimable. Mais il est presque impossible de parler des paysages de ces couches, ainsi que de la forme de ces grandes créatures : chacune d'entre elles se trouve simultanément en de nombreux points de sa couche. "Le Roi des Ailes qui bénissent", Wayumne, est un esprit incarné de l'océan d'air. Son royaume s’étend des extrémités de l'atmosphère jusqu'aux abîmes les plus profonds. Son frère, "le Roi des Eaux Vivifiantes", Éa (il est possible que son autre nom soit Vlarole), lui, était vénéré par les Grecs en tant que Poséidon, par les Romains en tant que Neptune, mais c’étaient les Babyloniens qui comprirent le plus profondément la bonté et la nature cosmique de son être : ils vénéraient le gardien et maître des eaux du monde avec un culte magnifique. Les deux esprits portent une garde éternelle aux origines de la vie sur toute la terre – non seulement dans Enrof, mais aussi dans de nombreuses autres sakouales. Les deux sont aussi anciens que l'eau et l'air, et aussi innocents qu’eux. Encore plus ancien est le troisième des frères, Pauvurne, "le Roi du Corps Flamboyant", puisque sous les croyances des anciens en Pluton et en Yama se cache la réalité la plus profonde. Ce terrifiant maître des magmas souterrains n'est pas un serviteur de Gagtoungre ; cependant, sa transformation arrivera, me semble-t-il, plus tard que tout, à la fin du deuxième æon. Il existe aussi un quatrième grand frère, le plus jeune : Zaranda, incarné dans sa couche à matérialité différente - "le Roi de tous les règnes d’animaux". L'histoire tragique du règne animal dans Enrof laissa sur son visage une empreinte du chagrin du monde véritablement profond. Et peu importe comment les historiens expliquent le symbolisme du sphinx égyptien, la métahistoire y verra toujours l’allusion à celui qui combine la nature de la Grande Bête avec une sagesse supérieure à celle de l'humain. Il y a sept élémentaux suprêmes. Les deux sœurs divines se partagent les sphères de pouvoir restantes : Estira, "la Reine du Jardin éternel", est la maîtresse des royaumes végétaux de Chadanakar et Lilith, "Aphrodite des peuples", est la maitresse de toutes les humanités.
L'importance de Lilith dans notre existence est incommensurable. Comme tous les Élémentaux Suprêmes, le monde de sa demeure est indescriptible et incomparable avec aucune de nos formes. Son apparence propre est inconcevable. Son corps subtil est présent dans de nombreux endroits de sa couche et elle ne prend une forme perceptible par la vision spirituelle d'un humain que dans peu de cas. Bien que je ne sache pas comment, je sais cependant que sans la participation de Lilith, aucun corps ne peut être créé dans les mondes à matérialité dense, à part les animaux dont les espèces sont formées par Zaranda. Sinon, dans tous les autres royaumes, ce travail est effectué par Lilith : elle forme la chaîne d’un clan à la fois dans l'humanité d'Enrof, parmi les daïmôns, ainsi que dans les mondes démoniaques – parmi les rarouggs et igves et aussi parmi les habitants du Douggour. Chaque corps à matérialité dense qu’elle crée dans les mondes obscurs s’appelle un karrokh. Voilà pourquoi elle mérite pleinement le titre de sculpteuse de notre – et pas seulement notre – chair. Par conséquent, la sphère des sentiments sexuels est étroitement liée à son existence et à son influence. Qu'elle soit elle-même ou ses karosses, mais ce principe est toujours à la base de tout acte sexuel humain, et tant que le fœtus se trouve dans l'utérus, elle est toujours présente.
Jadis, dans les temps anciens les plus profonds, cet élémental devint l'épouse du Premier Ange – le plus grand Esprit qui évolua en Logos de Chadanakar. C'était à l’époque de la création des mondes angéliques, et Lilith devint l'ancêtre de cette première humanité. Mais Gagtoungre réussit à pénétrer dans le monde de Lilith, suite à quoi son corps le plus subtil prit un certain élément démoniaque. Ce fut un désastre. Depuis lors, toutes les chaînes des clans formées par elle, que ce soit dans les mondes des titans, des daïmôns ou ceux des humains, perçoivent au moins un principe de cet élément. Le mysticisme juif connaît le terme "éycéhore" qui veut dire « la graine du diable dans l'homme ». Essayons d'utiliser ce terme pour désigner cette graine maudite à la fois chez l’homme et chez Lilith même, qui la porte jusqu’aujourd’hui, et chez ses karosses. Seule Lilith possède une monade et toute la plénitude de la conscience : ses manifestations locales, les karosses, y compris Dingra de la Russie, avec toute leur puissance et leur stabilité séculaire, n'ont que l'équivalent de cette conscience et sont dépourvues de monades. On doit à ces sculpteuses de la chair physique des peuples, entre autres, ces traits de similitude parfois évidents, parfois presque imperceptibles, la parenté physique visible, qui marquent un tas d’apparences individuelles d’un peuple. On sait que dans les époques antiques, à Chypre, le culte de la déesse de l'amour s'est scindé, à un moment donné, en deux opposés : le culte sublime d'Aphrodite Uranie, de l'amour spirituel, créatif, poétique et poétique, et celui d'Aphrodite Pandemios, qui peut être grosso-modo traduit par l'expression "Aphrodite Populaire". Il s'est largement répandu dans les classes inférieures du peuple, se manifestant par des festivités orgiaques et bénissant la dépravation comme un hommage sacré à la déesse. Certaines autres cultures connaissent également un processus similaire de bifurcation et de polarisation d'origines autrefois unies. Et d’autant plus nombreuses sont les cultures où l’étape ultérieure est clairement exprimée : le culte de la dépravation et le mélange chaotique d'éléments démoniaques et élémentaires sous le faux couvert du divin. La prostitution rituelle en Canaan, en Babylonie, en Inde et dans d'autres pays est un phénomène de cet ordre. Au-dessus de telles institutions, au-dessus du zèle des sectes orgiaques, au-dessus des copulations des masses, se dressent toujours les karosses des nations ou des suprapeuples. Il est également clair que de tels phénomènes ne peuvent avoir lieu sans participation de la démonesse lunaire et des forces obscures du Douggour. Mais dans la lutte contre ceux qui menacent d’exterminer son peuple physiquement, le démiurge cherche un défenseur puissant et guerrier, il est, donc, obligé de descendre jusqu’à la karosse et de s'unir avec elle. Le maudit éycéhore entre inévitablement dans leur créature, et la chair infectée de la karosse crée un double monstre. C'est ainsi que naissent tous les premiers huitzraors dans leurs lignées. La libération des karosses et de Lilith de l'éycéhore ne sera apparemment possible que dans le deuxième æon.
Le premier et le dernier des Elémentaux Suprêmes est la mère pour tous les autres, et non seulement pour eux, mais pour tout ce qui existe dans Chadanakar : pour chaque élémental, chaque bête, chaque humain, daïmôn, ange, démon et même pour toutes grandes hiérarchies. Matrice inépuisable, elle est ce qui crée les corps éthériques de tous les êtres, et participe à la création de leurs corps astraux avec leurs monades personnelles. Elle se caractérise par un amour chaleureux inépuisable pour tout le monde, même pour les démons : elle languit d’eux, elle les pleure, mais elle les pardonne. "Mère", elle est appelée ainsi par tout le monde, même par les anges des ténèbres et les monstres de la Gachcharve. Elle aime tout le monde, mais ne vénère que les plus hautes hiérarchies de Chadanakar et, en particulier, le Christ. C’est le Soleil qui la féconde : tant dans Enrof que dans son propre monde indescriptible, c’est ce grand esprit éblouissant qui la féconde. Elle perçoit les humains, leur état d'esprit, leur image de soi, elle nous entend, l'appel de notre cœur trouve un écho chez elle et elle nous répond à travers la nature et par l'amour. Que son nom soit béni ! Elle peut et doit être priée avec une grande humilité.
Que la fille de la Terre et du Soleil, la belle Lune, soit bénie, et que le Soleil soit trois fois béni. Nous avons tous été autrefois – avec notre futur corps, ainsi qu’avec notre future âme, avec tout le Chadanakar – dans ses profondeurs pures. Ô grand Dieu porteur de lumière ! Tu as été loué dans les temples d'Egypte et d'Hellade, sur les rives du Gange et dans les ziggourats d'Ur, au pays du Soleil Levant et à l'extrême Ouest, ainsi que sur les plateaux des Andes. Nous T’aimons tous, qu’on soit méchants ou gentils, sages ou ignorants, croyants chacun à notre manière ou non croyants – ceux qui ressentent ton cœur, incommensurable dans sa bonté, et ceux qui se réjouissent simplement de ta lumière et de ta chaleur. Ton éblouissante Élite a déjà créé une échelle de mondes rayonnants dans notre Chadanakar et déverse des cascades de bénédictions spirituelles de plus en plus bas – dans les mondes des anges, dans ceux des élémentaux et de l'humanité. Bel esprit, initiateur et père de toute chair, image éclatante comparable au Soleil du Monde, icône vivante de l'Un, laisse-moi verser une voix, inaudible à personne d’autre que Toi, dans Ta louange universelle. Aime-nous, Toi qui brille !